La France connaît un épisode de canicule précoce depuis 10 jours. Les employeurs sont tenus par le Code du travail de prendre des mesures pour protéger leurs salariés les plus exposés. Selon l’INRS, la chaleur est un facteur d’accroissement des risques d’accidents du travail, pour des raisons physiques (mains glissantes, vue brouillée, etc.), mais aussi psychiques. « Lors de l’exposition à la chaleur, des effets psychologiques/cognitifs sont également observés, comme l’augmentation du temps de réaction, des erreurs ou omissions. Il est toujours plus difficile d’effectuer une tâche demandant de la précision et plus risqué de réaliser une tâche demandant un effort physique important dans une ambiance très chaude ».
L’obligation générale de sécurité de l’employeur : article L4121-1 du Code du travail
D’une manière générale, la loi oblige l’employeur à prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver la sécurité et la santé de ses salariés. Cette obligation suppose d’agir en amont en réalisant des actions de prévention, en évaluant les risques, en informant les salariés et en prévoyant une organisation ainsi que des moyens adaptés.
Les obligations particulières en période de chaleurs et canicule
En période de fortes chaleurs et canicule, l’employeur doit mettre en place les mesures nécessaires à la protection de la santé de ses salariés afin que ceux-ci puissent :
-faire preuve de vigilance et veiller les uns sur les autres pour réagir rapidement en cas d’épuisement ou de déshydratation ;
-protéger leur peau et leur tête du soleil ;
-signaler un malaise ou coup de chaleur ;
-respecter les gestes barrières afin d’éviter le port des masques en continu ;
-mettre à disposition de l’eau potable à proximité des postes de travail (bouteilles d’eau individuelles ou point d’eau avec gobelets, régulièrement désinfecté) ;
-adapter les horaires de travail dans la mesure du possible.
Pour le travail en extérieur, il s’agit également :
-de mettre à la disposition des travailleurs un local de repos adapté aux conditions climatiques ou aménager le chantier de manière à permettre l’organisation de pauses dans des conditions de sécurité équivalentes ;
-de mettre à la disposition des travailleurs au moins 3 litres d’eau potable et fraîche au minimum par personne et par jour (chantiers du BTP) ;
-veiller à ce que les conducteurs d’engins et de véhicules ne soient pas exposés à des élévations de température trop important
Certaines dispositions émanant des articles R4121-1, R4222-1 et suivants du Code du travail, sont à connaître.
– Si les locaux sont fermés, l’air doit être renouvelé et ventilé afin de garantir la pureté de l’atmosphère, éviter les températures élevées, les odeurs désagréables et les condensations.
– De l’eau fraîche et potable doit être mise à la disposition des salariés.
– Les postes de travail extérieurs doivent être aménagés afin de protéger les travailleurs des conditions atmosphériques.
– Dans le secteur BTP, trois litres d’eau par jour doivent être distribués à chaque salarié, un local doit être prévu pour permettre de garantir la sécurité et la santé des salariés. À défaut de l’aménagement d’un local, le chantier doit être aménagé pour préserver la santé et la sécurité des salariés.
Vigilance pour les départements en vigilance rouge : instruction du 31 mai 2022
Dans le cas des départements en vigilance rouge, situation qui impose une « vigilance absolue » face à « un phénomène dangereux d’intensité exceptionnelle », l’employeur est tenu de procéder à une réévaluation quotidienne des risques encourus par chacun des salariés, en fonction de l’évolution de la température, de la nature des travaux, de l’âge et de la santé des travailleurs.
Le ministère du Travail vient de rappeler cette obligation dans une instruction du 31 mai 2022 relative à la gestion des vagues de chaleur. Le Code du travail interdit, par exemple, de façon absolue, d’affecter les jeunes travailleurs à des travaux les exposant à une température extrême susceptible de nuire à leur santé. En fonction des résultats de la réévaluation, le chef d’entreprise doit ajuster la charge et les horaires de travail, en favorisant les heures les moins chaudes, et réexaminer la liste des salariés bénéficiant du télétravail.
Les employeurs sont susceptibles d’être indemnisés ou de bénéficier d’une récupération des heures perdues durant les épisodes de vigilance orange ou rouge. « Les entreprises peuvent alors recourir au dispositif d’activité partielle ou de récupération des heures perdues. Concernant le secteur du BTP, les employeurs peuvent bénéficier du dispositif « intempéries » », détaille le ministère. Ces trois dispositifs ne sont toutefois pas cumulables.
Saisine de l’inspection du travail en cas de manquement de l’employeur
Les salariés, de leur côté, peuvent saisir l’Inspection du travail si l’employeur n’a pris aucune disposition, s’ils considèrent insuffisantes les dispositions prises au regard des conditions climatiques constatées ou s’ils se voient opposer un refus en cas de demande d’aménagement, en particulier la mise à disposition d’eau fraîche et de locaux suffisamment aérés. Ce sera à l’inspecteur du travail d’apprécier si les circonstances climatiques et la situation des salariés justifient un aménagement du poste de travail.
Droit de retrait possible en cas de danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé
Le salarié a le droit de se retirer de son poste de travail s’il estime qu’il encourt un « danger grave et imminent » pour sa santé et celle des autres travailleurs, selon l’article L4131-1 du Code du travail. Pour exercer son droit de retrait, il n’a pas besoin d’être autorisé par son employeur.
Selon l’INRS, aucune indication de température maximale au-delà de laquelle il serait dangereux ou interdit de travailler n’est donnée dans le Code du travail. Toutefois, la chaleur peut constituer un risque pour les salariés au-delà de 30 °C pour une activité sédentaire et de 28 °C pour un travail nécessitant une activité physique. Des températures qui sont largement dépassées durant cet épisode et qui pourraient l’être de plus en plus souvent à l’avenir, au fur et à mesure des manifestations de l’aggravation du dérèglement climatique.
Enfin, les lieux de travail doivent être équipés d’un matériel de premier secours, adapté aux risques et facilement accessible.
La présence d’un salarié formé au secourisme est obligatoire dans deux cas :
-dans chaque atelier où sont accomplis des travaux dangereux ;
-sur chaque chantier employant 20 travailleurs au moins pendant plus de 15 jours où sont réalisés des travaux dangereux ( C. trav., art. R. 4224-14 et s.).
En dehors de ces deux cas, il demeure néanmoins recommandé de disposer de salariés aptes à pouvoir apporter les premiers secours à une victime d’accident du travail, voire de malaise et ce, quels que soient les risques ou l’effectif de l’entreprise.
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